•  
  •  

  EDITORIAL POLITIQUE

 LES JUTEUX  MARCHES  DE LA PEUR
 AU PROFIT D’UN CONTRÔLE   SOCIAL  GENERALISE

  PROLOGUE 
 Avec  toutes  les pressions exercées sur nous nous, on peut  ériger un monument à la  soumission  (…)   Secrets de  fabrique, »  contrats business plans «  , nouveaux produits , etc.. Il fut un temps où fouiller les poubelles d’une entreprise était l’un des moyens les plus courant pour s’approprier les informations confidentielles d’un rival .   C’était l’espionnage de Grand – Papa  . Maintenant, hyper-concurrence mondiale et progrès technologiques obligent l’espionnage industrielle  d’utiliser  , à présent des méthodes plus sophistiquées .   Et tout autant que les firmes, impliquent  les Etats : sous prétexte de surveiller les pays et les entités hostiles, l’Agence nationale de sécurité américaine (NSA) n’a t-elle pas infiltré, entre autre, » Pemex et Petrobras » , les géants pétroliers brésiliens et mexicains ?   Depuis l’éclatement des affaires Assange, Sboden  et consorts, nous assistons à la naissance d’un  monstre au service des puissants  publics ( NSA)  et une kyrielle de satellites privés , non moins nocifs que cette dernière .

En effet,  le  marché de  la peur  rapporte  gros aux petits malins qui ont su se profiler au bon moment .  Profitant de l’explosion des capacités de collectes, de  stockage et d’analyse de données , des entreprises qui s’intéressent de près à leurs consommateurs potentiels .  Leurs centres d’intérêts , leurs  liens sur les réseaux sociaux , leurs  goûts culturels, les lieux qu’ils visitent  , ou encore , leurs achats  , sont ainsi passés au crible par des programmes qui suivent les traces qu'ils laissent  sur la toile . Echapper à leur harcèlement relève de l’exploit et  du  parcours du combattant .  

 SOUS PRETEXTE D’UN DANGER PROTEIFORME,
UNE ARMADA MONDIALE DE LA SECURITE  VEILLE AU GRAIN !


En un jeu de surenchère permanente, l’échec de chaque technologie déployée dans le cadre de la « guerre   contre le terrorisme »  justifie le déploiement sans limite d’un arsenal , toujours plus sophistiqué  et toujours « peu efficace « , au regard de ses objectifs avoués. Mais l’essor du marché de la peur a d’autres ressorts , plus clandestins .   Dès lors, comment expliquer cet acharnement , critiqué par la plupart des praticiens (policiers ou militaires)   de la lutte anti-terroriste ?  Pourquoi , malgré son inefficacité avérée et sa disproportion  par rapport à l’objectif , se maintient une fringale d’encartage , d’informatisation de données personnelles et de traces corporelles, de suivi tactile, visuel, thermique, olfactif  et radio-fréquentiel des êtres humains, partout ? Pourquoi photographier  les citoyens d’une cité une centaine de fois par jour et les filmer continuellement avec plus de cinq cent mille caméras dissimilées  dans la capitale anglaise par exemple , puisqu’on sait que cela n’a pas empêché des terroristes de déclencher leurs bombes, le 7 juillet 2005 ?

Pourquoi vouloir  abandonner les principes de la « privacy » *  et de l’anonymat  de chacun face aux puissances publiques ou privées ?   Au-delà des prétextes de maintien de l’ordre, n’existe qu’une explication pertinente : les  institutions est des entreprises découvrent dans la gestion de la peur un gisement durable de pouvoir, de contrôle et de profit …   Par ailleurs, depuis le 11 septembre 2001, l’urgence légitimant l’action sans aucune garantie démocratique , les entreprises et les institutions qui vendent  leurs produits de « sécurisations «  se sont engagées à fond dans le « business » de la peur , sûres d’être soutenues par les Etats , bien qu’un climat d’inquiétude  nuise ordinairement aux affaires .  Ainsi se construit , sous prétexte d’un danger éminent, une armada mondiale de la sécurité  , dont les convergences rapides et fonctionnelles donnent à penser qu’il s’agit  d’un noyau d’un nouveau capitalisme de la peur .   Par ailleurs, la plupart des grands groupes industriels et technologiques proposent désormais , de façon quasi militante des services ou des produits «  de sécurité «  , à partir  de leurs orientations classiques . En effet, chaque professionnel dénote un marché en croissance , à savoir :  L’AFIS  (Automatic Finger Imaging System ) Comparaison d’une empreinte avec celles que contiennent les banques de données informatisées  ou de classiques CCTV ( Closed  Circuit télévision  - surveillance vidéo)  .
 

DETECTION DE COMPORTEMENTS SUSPECTS DANS LES  LIEUX  PUBLICS  

La détection des  comportements suspects dans les lieux publics se fait grâce à des logiciels d’interprétation de gestes  en produisant de publi-reportages sur les écrans de métro , trams, bus  etc… Les grands de l’informatique et de l’électronique usent et abusent de ces procédés, à la limite de la  légalité .  Thales (ex-Thomson CSF), produits des panoplies de vidéo-surveillance sans hésiter de les vendre à des Etats, le moins qu’on puisse dire, autoritaires , voire dictatoriaux.  

Les grands de l’informatique et de l’électronique ne sont pas en reste , tels Microsoft et sa fameuse puce «  Palladuium «  , capable de contrôler, de l’extérieur la gestion des fichiers PC, ou Sony, qui a mis au point une  « étiquette  sans contact » , détectable  par radiofréquence (RFID)et apte à tracer des produits marqués au domicile de leurs acheteurs  ou des voleurs …   Plusieurs groupes recourent à des procédés similaires  comme la chaîne britannique Tesco ,  qui  expérimente un suivi radio-fréquentiel des emballages .   En effet , on peu partir d’un métier précis pour proposer une contribution « patriotique » :   Un gros producteur de connectique électronique qui propose un » Stiky  Schoker » -une arme électronique de « pacification » . La  petite entreprise  Applied Digital , naguère spécialisée dans la fabrication d’innocents boîtiers de contrôle de l’humidité , clés de voiture ou de garage, ayant crée la puce  « verichip , injectable sous la peau » ! Qui  promet de pister les personnes …    

DES PROJETS FACILITANT LA REALISATION &
L’INTERCONNECTION DES GRANDS FICHIERS CENTRALISES
 

On peut encore  citer ce grand trust pharmaceutique  « Eli-Lilly «  , inventeur, entre autre du Prozac, qui développe des recherches sur le contrôle à distance des détenus à domicile , met au point , par exemple , un bracelet-senseur , repérant  la consommation d’alcool  et de cannabis , pourvu  d’un  déclencheur de substances inhibitrices ou de chocs électriques .    L’empressement  de nombreux états à l’identification électronique des étrangers , des criminels , mais aussi  leurs propres ressortissants , se révèle décisif .  Les commandes de «  L’Etat –sécuritaire «  sont aussi massives que celle  de l’ancien « Etat-providence » .  En effet, les budgets publics soutiennent le marché de biométrie , estimé à plusieurs dizaines de milliards de dollars .  Ainsi l’administration des Etats-Unis a-t-elle commandé , en 2005, à  «  Antean «  , mille lecteurs  pour le «  US Visit » ,  destiné à contrôler les entrées sur le territoire national  des étrangers ainsi que les résidents permanents ou frontaliers .   La  collecte d’information préalable sur les passagers , le marquage d’indicateurs personnels par les douanes , le fichage d’empreintes digitales numérisées – tels le Système automatisé d’identification dactyloscopique  (SAID), de la gendarmerie royale de Canada ou celui destiné aux non-résidents des pays de l’espace Schengen  (SIS), représentant un juteux marché pour les entreprises .  L’Etat, est également indispensable pour défricher les bases d’une nouvelle organisation socio-technique de la société .  

Ainsi , les  pays européens se sont-ils mobilisés pour réfléchir aux contenus d’un nouveau support universel d’identification :  l’état civil , mais aussi , une photo  d’identité , une empreinte digitale et la configuration de l’iris de  l’œil numérisés . Sans parler des signatures informatiques utilisables dans les transactions privées , qui changent ainsi les Etats en certificateurs  automatiques des contras .   En France, le projet  de  carte nationale électronique (CNI e ), obligatoire et payante, a été récusé par la Commission Nationale de l’Informatique (CNIL) , et considéré comme « scélérat » par la Ligue des  droits de l’homme . Il  ne se situe pas dans la banale lignée  d’un « «  toujours plus d’identification « , réitéré  depuis deux siècles par toutes les polices , dans la plupart des pays développés , sous les éternels prétextes de fraude, du contrôle des étrangers  et de la modernisation de l’Etat  .  Il rapproche quatre éléments ordinairement séparés , en l’occurrence : le corps présent des porteurs , la trace laissé par ce corps , la carte combinant traces et informations personnelles , et le fichier central exhaustif gérant l’émission et la référence  des cartes authentiques . En liant les données biométriques  ( nouveau nom de l’anthropométrie d’Alfonse Bertillon) et données sociales , le projet aurait facilité  la réalisation et l’interconnexion des grands fichiers centralisés (dont l’existence , en 1943, aurait empêché toute échappatoire aux rafles ) .  D’autres part, en combinant la puce électronique embarquée  et l’obligation – comme sous Vichy- de porter la carte , il appelait la puce sous-cutané, véritable équivalent civil  du marquage des criminels récidivistes au fer rouge jusqu’en 1832, en France , ou à l’encre indélébile  en Grande Bretagne au XIXe siècle .   Certes, nous n’en sommes pas à l’implant obligatoire , et le franchissement de la peau ne sera probablement jamais réalisé .

Mais soulagés d’avoir écarté cette horreur grâce à un rejet majoritaire , nous risquons de ne pas voir la CNI et fonctionnera  « comme si » le corps était enfin atteint . Elle pourrait par exemple , permettre de suivre sos déplacements –beaucoup plus sûrement  avec le livret ouvrier  ou passeport intérieur ne  permettaient aux régimes policiers , soviétique ou napoléonien  de pister le citoyen sur le territoire national . A fortiori, une telle carte, « sans contact »  pourrait permettre  aux autorités du pays tiers, capables d’imposer leur loi (comme c’est le cas aux Etats-Unis ) de connaître à chaque instant où se trouve un visiteur étranger .   Cette évolution est en cours : déjà les agences gouvernementales américaines ont fait fabriquer des millions de cartes d’identification de leurs personnels, capables de dresser un historique de leurs déplacements , de leur utilisation d’ordinateurs , et de conserver des données personnelles comme leur niveau de salaire .  

LA COMBINAISON D’UNE MILITARISATION DES POLICES PUBLICS
 ET PRIVEES DANS LE CADRE D’UNE « CIVILISATION «  QU S’ACCELERE …

   Enfin ,  une fois assuré la connexion aux autres systèmes informatisés  ( cartes sanitaires ou de crédit , avec ou sans contact, signature  sur Internet  etc…)  La diffusion radio-informatique des informations , des traces et du corps  crée une nouvelle société où Etat et entreprises  se confondent dans un effet  de toute-puissance sur la personne . En effet l’enchainement des innovations de sécurité nous révèle ainsi, en pointillés de plus en plus rapprochés , un projet  de société géré par la collaboration sans frein des puissances privées et des institutions publiques .   Après ce déploiement technologique préparant la  société de contrôle , le second trait frappant de ce nouveau capitalisme réside dans la fusion progressive  entre la peur de l’ennemi et la défiance envers le citoyen , entre le policier  et le militaire … Comme démontrent à l’envi, les salons des industries de sécurité , tel  «  Milipol » à Paris .  La combinaison d’une « civilisation «   des armées et d’une militarisation des polices  publiques et privées .  Les revues militaires  banalisent l’idée de « fantassin en contrôle de foule (…) !   

Désormais, la  plupart des groupes spécialisés en sécurité distribuent presque similairement leurs personnels entre la surveillance des locaux, le gardiennage de prison , le métier de garde du corps  et celui d’ « officier de sécurité »  qu’ils offrent aux armées officielles .  En témoignage de l’alliance des multinationales de « Wacenhut , Serco, Group 4 –Falk »  aux bases américano-britanniques  et  Canadio Suèdoises , dont les services vont de la gestion des prisons privées  (plus de soixante établissements  qui gèrent soixante mille détenus  aux  Etats-Unis , sans oublier les diverses polices privées , jusqu’à l’entraînement  de compagnies entières de sécurité militaire  …En passant par la recherche –développement sur le contrôle à distance des  condamnés  et sur la mise au point de systèmes d’identification  et de traque .  

Ce professionnalisme n’interdit pas la barbarie : « Wackenhut »   a pu être mis en cause dans le traitement des détenus américains , et l’on sait , autre exemple , que la CACI International , ou Titan Corporation , très engagés  dans le « Homeland Security »  ont été cités dans des scandales des tortures infligées par des contractants civils encadrés par la Central Inteligence   Agency (CIA) dans les centres pénitentiaires gérés par l’armée américaine en Irak (Abou Ghararib  »  ou la baie de Guantanamo .  Est-ce un hasard  si Titan effectue aussi des recherches sur les empreintes biométriques ? Sur le plan  technologique , des applications scientifiques , militaires et policières se mêlent tout aussi inextricablement . 

 LES  PRINCIPAUX APPUIES DU MARCHE DE LA PEUR EN EUROPE

Ainsi, en France, la SAGEM produit des hélicoptères, des drones, des viseurs , des simulations , des terminaux  sécurisés de jeu de cartes de crédit .  Mais elle aussi devenue le numéro un mondial  des mesures d’empreintes digitales et propose enfin des « solutions gouvernementales «  sur les sujets difficiles , comme la gestion de crise .  Autre exemple : American Science and Engineering  (AS & E), qui embarquait des  appareils de radiographie  dans des missiles , et qui travaille à détecter  des narcotiques aux douanes. L’entreprise est aussi fière de son dispositif  Mobile Search , qui a permis d’arrêter des centaines d’immigrés  clandestins mexicains .   Par ailleurs, les laboratoires « Sandia » – partenaire classique du système  militaro-industriel américain  - ont mis au point un système de traque  des prisonniers à l’aide des systèmes de localisation par satellite GPS  et fabriquent des « renifleurs «  d’explosifs. Autre curiosité , la firme américaine Foster.Miller  construit des machines à  conditionner  les caramels ou le Pepsi (…), réalise aussi  un filet pour capturer un ennemi  qu’on veut pas tuer .  Elle  participe à la fabrication du rebot Talon, capable de manœuvrer des  armes .d’assaut en guérilla urbaine .  Ainsi la notion  d’arme non létale aide-t-elle  de combiner  des  métiers industriels  très différents .   Par ailleurs, le partage du travail  idéologique entre les lobbies industriels , administrations policières,  et filon médiatique de la  permanente se  systématise . Sans lui  , la réorganisation de nos sociétés autour du « contrôle  sur  tous «  , serait impossible . 

Certes le programme  total information Awarenss, qui prétendait , au lendemain du 11 septembre 2001, réunir pour le compte du département américain de la défense toutes les informations disponibles sur les six milliards et demi  d’habitants de la planète , était  un délire .  Ce qu’il  annonçait  était plus durable et plus dangereux : un prosélytisme sécuritaire de portée planétaire visant à se démarquer des principes démocratiques et libéraux sur lesquelles les sociétés occidentales s’appuient . 

PEUT-ON CONVAINCRE  LES ENFANTS DU BIEN-FONDE DE L’EMPREINTE 
DIGITALE COMME MOYEN NORMAL DE L’IDENTIFICATION ?
 

Face au danger , le groupe électronique Gixel  suggère dans son livre bleue, paru , en juillet 2004, de généraliser le pistage électronique dès la maternelle pour éduquer les jeunes esprits des « bienfaits »  de la biométrie … De leur côté , les jeux vidéo proposés de la plupart des grands producteurs américains , asiatiques ou européens font accepter aux adolescents  un univers de passage ne s’ouvrant que sur présentation se sésames adéquats, tandis que se multiplient les initiatives, qui, comme la « carte à puce «  banalisent auprès  des enfants l’idée que l’empreinte digitale est un moyen normal d’identification !    

L’ALARMANTE BANALISATION DES VIGILES  

En quelques années , l’insécurité est devenue l’un des thèmes-phares du discours politique , tous partis confondus . Porté par le climat d’inquiétude , la participation des entreprises privées à des missions de sécurité publique va crescendo :  gardiens de parking ou supermarché, maîtres-chiens , intervenants sur alarme, vigiles  …Grâce aux sociétés de surveillances , l’ordre règne sans la police ait besoin de se montrer .   Que ce soit dans notre environnement quotidien, un peu partout, le nombre de vigiles n’en finit pas de croître .  Supermarchés, parkings, galeries commerciales, bureaux, gares, voies publiques, universités, musées , manifestations culturelles et sportives, et mêmes les bibliothèques  n’échappent pas à la voracité  des sociétés de sécurité .  En effet,  depuis 2001, dans le cadre de la « lutte contre le terrorisme, ayant été le prétexte facile permettant à tout un chacun  d’équiper  son commerce  (boutique, établissement , local  de ces agents de sécurité  (APS) – l’appellation reconnue par la collection collective du secteur .  En 2012, 3700 entreprises  , en France se partagent ce juteux marché qui génère un chiffre d’affaire global  de 5,4 milliards d’euros .

En Suisse, une dizaine d’agences de sécurité se partagent un gâteau de 2,8 milliards de Francs suisses .  Un marché opaque et frileux   imperméable aux contrôles des services des cantons  .   Mais qu’on ne s’y trompe pas , la fonction de ces agents est avant tout  d’ordre économique : dissuader les voleurs , prévenir les dégradations , assurer une utilisation conforme des équipements dans les espaces mis à disposition du public .   Des dispositions technologiques de pointe ( télésurveillance, systèmes d’alarme et de détection ), contrôlés  par des vigiles , eux-mêmes, contribuent à la réussite de leur mission .   C’est donc bien la sécurité de l’établissement lui-même (marchandise , équipement personnel , chiffre d’affaires ) que les APS et leurs moyens de surveillance onr finalement la charge d’assurer  - contrairement à ce qui est le plus souvent annoncé : « Pour votre confort et votre sécurité, une société de surveillance est présente dans votre magasin …«    En effet, du fait même de cette imposture , la présence redoublée de vigiles dans l’ensemble du champ social produit  des effets invisibles sur le public . Effets qui trouvent leur origine dans le flou qui entoure l’exercice de leur fonction. Confusion quant à leur  rôle , quant à leur pouvoir , et finalement quant à la définition même de cette « sécurité »  qu’ils sont censés à  assurer et justifier l’incessante augmentation de leurs effectifs .  Confusion d’autant plus prégnante que les médias abordent rarement le sujet du point de vue du droit . Cette profession est floue , en plus d’ouvrir la porte à toutes les dérives, diffuse le floue autour d’elle . En effet, les individus , quant ils sont confrontés   quotidiennement aux APS, en viennent à faire chevaucher  des  sphères pourtant bien délimitées de la vie sociale  à prendre  certains domaines pour d’autres , en adoptant des comportements qui n’ont pas lieu d’être .   L’omniprésence des vigiles  tend à brouiller les grandes séparations constitutives de la société , notamment celle qui existe entre le régime de la loi et celui de la règle  ( par exemple , le règlement intérieur d’un lieu) , mais aussi celle entre l’espace public et l’espace privé .    

SURVEILLER ,  CONTRÔLER , ET SURTOUT DONNER L’ALERTE …
AU NOM D’IMPERATIFS  SECURITAIRES
  

A cela s’ajoute la confusion chez les employeurs qui, profitant de la situation ou mal informés, accordent presque immanquablement aux vigiles des droits qui ne sont pas les leurs ***,  pourtant  les vigiles ne sont ni policiers ni gendarmes . Ils n’appartiennent pas au contingent des forces de l’ordre .  Des règles très strictes le stipulent . Ne seraient-ce , justement que celles régissant leur tenue.  En effet , «  Sauf dérogation, les APS doivent porter , dans l’exercice de leurs fonctions , une tenue particulière . Celle-ci ne doit entraîner aucune confusion avec les tenues des agents des services publics , notamment de la police nationale, de la gendarmerie , des douanes et des polices municipales « .    Or, quand bien même  cette exigence de distinction vestimentaire serait respectée , ce qui est loin d’être le cas , les APS se présentent toujours , du point de vue symbolique , comme représentant de la loi . Ce qui n’est pas le cas en Suisse  ( les vigiles portent souvent les insignes « SECURITAS »  ) presque dans tous les cantons romands . La confusion du genre en Suisse est quasi inexistante .  Le législateur helvétique ne badine pas avec ce genre de confusion  . 

 
Par ailleurs, si un agent de police est l’intermédiaire entre le citoyen et la justice, le vigile ne serait que l’intermédiaire entre le citoyen et cet agent de police .  Il resterait donc du côté des forces de l’ordre , ayant pour mission principale de les prévenir en cas d’infraction , représenterait seulement un maillon supplémentaire dans le processus d’application de la loi .  Et, pourtant, il faudrait s’étonner de ce que les médias ne relaient pas une information  aussi cruciale , les APS sont des citoyens comme les autres . Ils n’ont pas  plus de pouvoir qu’un citoyen ordinaire , pas  plus de privilèges ou d’autorité  . Les professionnels de la sécurité  sont des « professionnels « , au même  titre de l’horlogerie ou de la restauration . Ils jouent  donc la plupart du temps un rôle qui n’est pas le leur . Car non seulement le vigile n’est pas plus près de la loi ou de la justice qu’un citoyen lambda , mais il est soumis au même titre .  

UN REGIME AUTORITAIRE DIFFUS, DONT LE CENTRE EST PARTOUT ET LA CIRCONFERENCE NULLE PART !
 

Dans la  pratique cependant, l’APS, par sa tenue, par sa fonction ,  par son attitude, n’en joue  pas moins sur le double registre de la loi et de la règle  et tend de faire passer la moindre incartade de la vie, le moindre événement pour un acte de délinquance  . A tel point que l’individu « déviant «  ne sachant jamais vraiment, s’il a affaire à un représentant de la loi  ou non, tend à accepter le blâme comme s’il s’agissait d’un appel à l’ordre .  ** Il se figure que son comportement est « illégal »  alors même qu’il est simplement et relativement à une norme contingente «  anormal » .

La confusion entre ces deux registres trouve en partie son origine dans le fait qu’on a transformé un rapport d’autorité  informel en un rapport d’autorité formel .  Elle ne tient pas en effet, à l’existence du règlement intérieur lui-même qu’à la décision de le faire appliquer par des professionnel extérieurs à la fonction de l’établissement en question .   Jusqu’à présent, le personnel des établissements ( bibliothèques chefs de rayon, guichetiers etc…) avait la charge de faire respecter les consignes, et donc sanctionner les individus non coopérants de manière formelle , donc humaine et vivante , manière qui pouvait changer en fonction des caractères et des circonstances.
  
Aujourd’hui, les APS  employés par les  sociétés sous-traitantes , sont au contraire, tenus de faire appliquer le règlement à la lettre , de suivre le protocole , d’informer  leurs supérieurs , de rédiger des rapports et de rendre des comptes . Là où une certaine souplesse pouvait encore trouver à s’exercer dans un rapport de pouvoir , c’est l’ordre mathématique et mécanique qui règne ; les mêmes causes observées doivent engendrer les mêmes effets .   En effet, le philosophe Michel Foucault a bien montré quels effets invisibles pouvaient être induits par cette confusion entretenue entre le régime de la loi  et le régime de la règle ; confusion caractéristique des sociétés dites «  dans l’exercice du châtiment .   Et  cela en faisant jouer l’un par rapport à l’autre les  deux registres où se déploie : c’est légal , de la justice , celui extralégal de la disciplinaires «   . Elle parvient en effet, à « rendre naturel et légitime le pouvoir de punir , à abaisser du moins le seuil de tolérance à la pénalité .  Elle tend à effacer ce qu’il peut y avoir d’exorbitant discipline «  .     

Par ailleurs, la présence d’un surveillant dans les lieux publics , ou d’accueil du public , va dans le sens d’un recouvrement de l’ensemble du champ social  par la logique du monde carcéral , qui donne ainsi une sorte de caution légale aux mécanismes disciplinaires ainsi qu’aux décisions et aux sanctions qu’ils mettent en œuvre  . Ainsi, la continuité carcérale de la diffusion de la plate-forme prison permettent de légaliser , ou en tout cas, légitimer , le pouvoir disciplinaire , qui esquive ainsi ce qu’il peut comporter d’abus … 

En effet la généralité carcérale , en jouant dans toute l’épaisseur du corps social et en mêlant sans cesse l’art de rectifier au droit de punir , abaisse le niveau  à partir duquel , il devient naturel et acceptable d’être puni (…)  Par ailleurs, le régime de la règle , tels que les vigiles contribuent à en généraliser  l’extension, compromet dangereusement l’exercice des libertés individuelles .  Il conduit, en effet, les individus à accepter plus facilement les rapports d’autorité,  à se montrer plus dociles  devant les manifestations du pouvoir, à normaliser les comportements , à réprimer toute forme d’excentricité ou d’extravagance .  Mais il se prémunit par la même occasion contre toute forme de manifestation d’ordre politique ou contre tout acte de désobéissance civile qui serait  susceptible de venir troubler la reconduction .   Au nom  des exigences  d’une prétendue sécurité , qui reste à justifier, les gérants de « propriétés privés de masse »  somment les individus qui les fréquentent de respecter les  règlements , souvent liberticides , tout en s’armant de « professionnels «   chargés d’y veiller à la loupe . S’il y a quelque chose qui relève du fascisme , ici , il faudrait  d’avantage parler de micro-fascisme *** .  

Par ailleurs,  le grand absent reste un plan d’ensemble qui fixerait les modalités d’application .  Pas d’agent particulier qui en serait l’instigateur , pas de texte fondateur qui énoncerait la doctrine générale , pas de complot non plus … Rien d’autre qu’un ensemble de volontés particulières qui se rejoignent , s’additionnent , se renforcent pour constituer finalement un régime  autoritaire  diffus , dont le centre est partout  et la circonférence  nulle part . Un régime qui offre par lui même bien peu de prises  à qui souhaiter renverser  .  Cependant rien n’est acquis à jamais, tous les régimes  ne sont pas à l’abri d’une tornade déferlante qui renverse tout à son passage .  Il suffit  de réveiller les consciences encrassées par la facilité  d’une vie insignifiante  qui ronronne  dans l’ignorance  crasse .      

CONCLUSION    

 Soupçons , fichage systématique, contrôle, pensées pour les délinquants, ou les terroristes , l’efficacité des législations  et des méthodes mises en œuvre semblent résider dans la peur de la menace de détection crée dans le public .  Mais à mesure que se développent les technologies de pointe dédiées à la surveillance absolue et sans limites , les sociétés dans lesquelles nous vivons peuvent-elles encore être qualifiées  de démocratiques ?   Les dispositifs biométriques constituent l’un des aspects les plus inquiétants des  technologies actuelles .  Car l’exercice du droit  de vote ressemble de plus en plus à un sondage d’opinion .  hélas,  l’Etat s’est transformé en un gardien de troupeau  de moutons qui s’occupe de la vie de ses sujets afin de produire des corps sains et dociles et ordonnés, corvéables à souhait et qui courbent l’échine sans état d’âme .  Quel triste sort pour l’humanité !  

DE 1984 … A 2014  -03-21   Extrait du livre de M. Armand Mattelrat  et M. André Vitalis , «
 Le profilage des populations .

 Du livret ouvrier  au cyber-contrôle , Editions la Découverte , Paris 2014  .
 

 Lors des révélations de l’accès aux communications des internautes par l’Agence Nationale de Sécurité américaine (NSA) , en juin 2013, la référence au roman de 1984 de George Orwell et son slogan  « Big  Brother is watching  you «  a semblé incontournable. 

 «  George rwell State »  a  ainsi titré le « Washington Post «  du 6 juin 2013, dévoilant en premier cette information avec « The Gardian » . Inscrivant les polémiques et les protestations dans un cadre connu  et conscrit , une telle représentation risque toutefois  d’en neutraliser les effets et de dispenser tout effort de réflexion . Car les conditions dans lesquelles se met en place  la hyper-surveillance  dans les sociétés actuelles n’ont rien à voir avec le monde totalitaire de l’Etat-parti décrit par Orwell .  

Toute perspective sur les évolutions de la surveillance dans un environnement numérique que celle-ci soit mise au service de finalités sécuritaires ou commerciales , doit tenir compte de ses traits réguliers . Les cyber-contrôles ont comme caractéristiques fondamentales d’être à  la fois invisibles  et automatisées .  En outre, l’évolution du rapport surveillant/surveillé  sera fortement dépendante dans l’avenir de l’appropriation des techniques numériques par le plus grand nombre . Alors que la relation de discipline fait appel à la participation de l’individu surveillé , les technologies réduisent ce dernier qu’un objet d’informations . A la différence des disciplines fondées sur la visibilités fondées sur la visibilité  de leurs dispositifs , l’efficacité des technologies de contrôle tient de leur invisibilité .  

Alors que dans la discipline l’individu participe à sa propre normalisation par l’autocontrainte et la maîtrise de soi, il est maintenant déchargé de ce travail grâce aux information  que l’on a  prélevées ,  sur lui , à son insu .  Souriez, vous êtes filmé à votre insu !!!   Par ailleurs, en permettant l’accumulation et le traitement d’une grande quantité de données , les progrès de l’informatique ont provoqué une  révolution bénéfique sur de nombreux points .  Cependant, dans un monde de chaque jour plus dépendant des progrès technologiques , des voix s’élèvent pour mettre en garde contre les potentialités liberticides d’une société de transparence  **** . 

 *
 Guerres asymétriques – Presse Universitaire de  France – Paris 2002 ;

 **Selon le politologue Didier BIGO- 11/03 2005-Privacy –sphère interdite à  L’ETAT ; *** Catégorie par le fichier centralisé du Système d’information Schengen (SIS II)- Le Monde Diplomatique , Mars,  2003 ;

 ****  Pierre Nora  et  Alain Minc , « l’Informatisation de la société , la Documentation française « , Paris  1978 .      
DR Mohamed BEN ABDALLAH

 DR OF BUSINESS ADMINISTRATION

 
SPECIALISTE  EN MACRO-ECONOMIE DU MAGHREB;

AUTEUR DE « L’INTEGRATION ECONOMIQUE DU MAGHREB
ENTRE
LE POSSIBLE ET LE REALISABLE «    EN LIGNE SUR NOTRE SITE

 
www.dr-ben-abdallah.ch

 
DEPUIS   Le 1er Mars  2009

 
  &

 EDITORIALISTE – REDACTEUR EN CHF

 
DU SITE  www.dr-ben-abdallah.ch 


 BASE  SIS    1202 GENEVE  II

 03/04/2014